Tous les chemins (européens) mènent au vert
L'enjeu écologique pour le secteur culturel européen, coopérer entre médias pour parler ruralité, un tour de l'actualité culturelle en Europe : bienvenue dans le douzième épisode de Lacets.
Lacets est une newsletter qui donne la parole aux acteurs et actrices du milieu culturel qui s’engagent dans des projets européens. À travers ressources, entretiens et recommandations, Mathilde & Laurent souhaitent encourager des structures culturelles de toute taille à s’aventurer vers cet horizon, en rendant plus accessibles les opportunités offertes par les financements européens.
Le réchauffement climatique prédomine les débats actuels, dans les sphères publiques et privées. Au sein du secteur culturel européen, quels sont les leviers d’actions et initiatives qui émergent pour y faire face ? Réponse avec Gwendolenn Sharp, experte de la question. On vous parle aussi de Rural story, un média qui fait la part belle à coopération autour de la thématique de la culture en milieu rural, bénéficiant du programme Erasmus+ d’éducation aux médias pour les adultes. Et pour commencer, un rapide tour d’horizon d’actualités culturelles européennes.
💌 Des remarques, idées, suggestions, retours, critiques ? Écrivez-nous à lacets@gmx.fr
Wassup l’Europe de la culture ?
🌱 Les 7 et 8 mars prochain, le Relais culture Europe s’empare des questions écologique et numérique dans son forum pour une Europe Créative, Écologie et numérique : je t'aime moi non plus ?
🗞 Le numéro 16 de la revue NECTART est récemment paru avec un thème à-propos : Urgence climatique, changer de culture !
🌀 Le projet Re-Imagine Europe lance un nouveau projet de coopération à suivre de près : New Perspectives for Action, visant à « outiller et autonomiser les jeunes Européen·nes par le biais de pratiques artistiques pour mieux résister aux défis sociétaux engendrés par le changement climatique ».
🎈IQ Magazine et YOUROPE ont récemment publié un rapport sur les festivals européens en 2022
🔮 Le projet européen EEnlarge organise la première conférence sur les lieux de musique de proximité SUBSTRAT.
〰️ Le projet européen Footprints fêtera ses deux ans à Amsterdam en mars prochain avec l’événement Change of the Century
💰 On The Move a publié en fin d’année dernière un guide des Financements de la Mobilité internationale pour les artistes et professionnel·le·s de la culture : focus sur les territoires ultramarins français
L’entretien : Gwendolenn Sharp, experte dans les question environnementales liées à la musique
L’entretien complet de Gwendolenn Sharp est à lire ici
Lacets : Pouvez-vous nous parler de The Green Room et des actions menées à travers ce projet ?
Gwendolenn Sharp : The Green Room est une association basée dans la Manche qui existe depuis 2016. Le cœur de sa mission est d’accompagner le secteur de la musique autour des enjeux environnementaux et climatiques, en France et à l’international.
Ces dernières années, l’Union européenne a lancé des messages forts sur le sujet de la lutte contre le dérèglement climatique, caractérisés par de multiples prises de parole sur la scène politique (notamment via le pacte vert). Comment ces discours se sont-ils traduits concrètement pour les acteurs et actrices culturelles ?
Je pense qu’il est important de rappeler que le pacte vert européen n’est pas une initiative descendante, qu’il ne vient pas de la bureaucratie bruxelloise, mais bien d’une préoccupation citoyenne et d’un désir, d’une volonté des électeur·ices qui sont allé·es voter pour les élections européennes avec un fort engagement écologique pour le projet européen. D’après l'Eurobaromètre de l'automne 2019, les citoyen·nes de l'Union européenne considèrent le changement climatique et l'environnement comme l'un des problèmes les plus importants auxquels le monde est confronté.
Nous observons une multiplicité de financements européens intégrant la question environnementale dans le secteur culturel, qu’est-ce que l’Union européenne attend des acteurs et actrices du milieu pour répondre au défi climatique ?
Les financements intégrant cette question sont effectivement plus nombreux, mais ils restent très modestes. Si on prend l’exemple du programme MusicAIRE pour la relance verte, numérique, juste et résiliente du secteur musical, deux appels ont été publiés, avec peu de financements et très peu de projets soutenus, alors qu’au vu des candidatures la demande est très forte pour ce type de soutien. Ces financements peuvent permettre la mise en place d’expérimentations et de projets pilotes, ils ne peuvent en aucun cas répondre à l’ampleur du défi.
Pouvez-vous évoquer quelques projets culturels européens qui travaillent sur ces questions ?
Il y en a évidemment beaucoup, mais pour donner un aperçu des sujets actuellement au travail, je peux citer le projet Europe Créative Rebuilding to Last mené par Trans Europe Halles. […] Le projet Footprints qui porte sur la mobilité des artistes du secteur du jazz et des musiques improvisées a expérimenté des modèles de tournées plus durables, inclusives et économiquement viables. […] Le projet « Hand to Hand » questionnent les notions de durabilité et d’écologie sociale […], le projet IMPALA Climate Training and Standards Project. […] Je citerais aussi des projets qui ont été soutenus et qui sont maintenant terminés comme GALA-Green Art Lab Alliance ou Shift Culture.
La prise en compte du respect de l’environnement est un critère obligatoire dans un appel à projet, qu’elle qu’en soit la discipline et l’objectif, comme l’est l’égalité des genres. Qu’est-ce que cherche à faire l’Union européenne avec ces critères, et comment cela peut-il évoluer ?
Ce sont des critères pour le moment incitatifs, ou des expérimentations autour notamment des questions de mobilité « verte » qui ont pu être testés au travers d’un financement plus important accordé aux artistes et opérateur·ices du secteur culturel quant à leur choix de mode de transport (I-Portunus) ou l’expérimentation de nouveaux modèles de tournées plus durables, si ce n’est bas-carbone (Perform Europe). Il manque cependant un cadre global et une cohérence entre ce qui est demandé par les différents programmes et appels à projets.
Lire notre entretien avec Gwendolenn Sharp dans son intégralité ici
Charbonner en coulisse : Sonia Moumen (Rural Stories)
Sonia Moumen est rédactrice-en-chef et réalisatrice chez Champs Libres Média, un projet éditorial traitant des sujets culturels en milieu rural, en Nouvelle-Aquitaine. Elle coordonne le projet Erasmus+ d’éducation aux médias à destination des adultes Rural stories, qu’elle présente ici.
Lacets : Pouvez-vous nous présenter Rural stories ?
Sonia Moumen : Rural stories est un projet européen (Ersamus+) d’éducation aux médias à destination des adultes. L’objectif est de faire entendre et de donner la parole au monde rural, trop souvent absent de la sphère médiatique, notamment dans le domaine culturel. Ce projet encourage et accompagne donc les citoyens, structures socioculturelles et entreprises des territoires ruraux à prendre la parole à travers les outils du journalisme mobile.
Ce projet a été pensé autour de deux outils principaux. Un guide des bonnes pratiques qui met en lumière des initiatives singulières et inspirantes en matière de journalisme citoyen et participatif et une boîte à outils comprenant 10 kits de formation plus spécifiquement anglée sur le journalisme mobile - MoJo. Le point d’orgue du projet a été une résidence de formation au journalisme mobile à Sainte-Foy-la-Grande (France) durant laquelle 10 habitants de Sainte-Foy, 4 journalistes et 6 représentant·es de structures socioculturelles belges, français et espagnols ont échangé et testé ensemble les kits de formation à l’occasion des Reclusiennes, un festival organisé sur place.
Les exemples et conseils que nous donnons dans notre Boîte à outils sont par exemple tirés de cette expérience, particulièrement riche et stimulante.
Ce projet sur 11 mois a été imaginé Le Nouveau Studio (France), en complicité avec Wazo Sociedad Cooperativa (Espagne), Le LABA (France) et Signélazer (Belgique) avec le soutien d’Erasmus+. Toutes les ressources sont en français, espagnol et anglais sur le site du projet ruralstories.eu.
Quelles sont vos missions dans le cadre de Rural Stories ?
Le Nouveau Studio, chef de file et initiateur du projet est par ailleurs le fondateur de Champs Libres Média, un média en ligne consacré à l’art et à la culture loin des villes en Nouvelle-Aquitaine. J’assure la rédaction en chef de Champs Libres Média. C’est dans ce cadre et en étant très présente sur le terrain que j’ai pu constater d’une part le déficit d’information sur les territoires ruraux, notamment dans les domaines de l’art et de la culture, et d’autre part la volonté des citoyen·nes en milieu rural d’être « acteurs ou actrices » de leur propre récit.
Plusieurs expériences en matière d’éducation aux médias m’ont amenée à réfléchir au projet idéal pour accompagner ces personnes adultes dans une meilleure compréhension de la « fabrique de l’information », et surtout de leur donner les clés pour un journalisme participatif et citoyen. Nous avons partagé ces questionnements avec Wazo coop en Espagne qui mène un travail essentiel en milieu rural en Extremadure autour des industries créatives, Signélazer en Belgique et Le LABA en France. Mon rôle au Nouveau Studio a été de penser le projet, de le coordonner, de le faire vivre avec nos partenaires, de le restituer, de lui donner un réel ancrage européen, même s’il s’agit pour nous d’un premier projet européen en tant que chef de file et qu’il n’a concerné que trois pays.
Avec quels outils coopérez-vous avec les partenaires de Rural Stories pour échanger sur le projet ?
Notre outil principal est le contact dans la langue de l’autre : espagnol avec les espagnols, français avec les belges et les français. Nous pensions utiliser l’anglais comme langue commune mais avons finalement gagné en temps et en clarté sans cet « intermédiaire universel ». Je l'ai dit, nous avons beaucoup privilégié les rencontres en présentiel (3 réunions transnationale), les visios avec tous les partenaires ou échanges téléphoniques et mails en bilatéral ou trilatéral. Le contact humain, avant toute chose.
Nous avons en parallèle utilisé des outils de partage assez classiques et faciles d’utilisation, notamment Google Drive pour mettre en commun en temps réel les informations. Entre les échanges très réguliers et des dossiers partagés, la coopération a été très fluide !
Comment obtenez-vous des informations sur les dispositifs européens tels qu'Erasmus+ ou autres appels à projets ?
Notre structure s’informe principalement en étant abonnée aux newsletters professionnels : Relais Culture Europe, On the move, Lacets. Plus régionalement, nous échangeons beaucoup avec Le LABA et nous tenons aussi informés via la la Région Nouvelle-Aquitaine.
Merci !
Un grand merci à Gwendolenn et Sonia d'avoir répondu à nos questions. Merci à vous aussi d’avoir lu jusqu’ici ; si vous avez apprécié, n’hésitez pas à transmettre cette newsletter à vos proches. On vous dit à très vite et d’ici là, n’hésitez pas à nous adresser vos retours et suggestions à lacets@gmx.fr ✌️